In memoriam Georges Colin 1927-2022


Né le 15 mai 1927, Georges Colin s’est éteint le 13 juillet 2022 à l’âge de nonante-cinq ans. Il entre très tôt à la Bibliothèque royale de Belgique. Le 13 juillet 1945 – il n’a pas vingt ans –, il s’y présente comme rédacteur temporaire à la section des Acquisitions, service des Livres rares et précieux, bientôt rebaptisé Réserve précieuse. Il y accomplit toute sa carrière, à l’exception d’une absence de deux ans, de 1952 à 1954, afin d’effectuer son service militaire. Docteur en droit, il gravit les différents échelons de la carrière administrative et scientifique d’alors : de stagiaire volontaire en 1951 à bibliothécaire en 1956, puis conservateur de la Réserve précieuse de 1961 à 1992, date de sa retraite. À cette date, il est en outre chef du département des Collections historiques, regroupant la Réserve précieuse, les Cartes et Plans et la Musique.

Ainsi Georges Colin contribue-t-il à l’émergence d’une nouvelle section au sein de la Bibliothèque royale, spécifiquement chargée de conserver les livres anciens et précieux et dont il devient le deuxième conservateur. Durant sa carrière, il assiste à la destruction progressive des anciens bâtiments de la Bibliothèque royale, à leur reconstruction et au déménagement de l’ensemble des collections.

Il laisse derrière lui une impressionnantes série d’acquisitions, de donations et d’expositions. Ses travaux scientifiques balaient cinq siècles et se concentrent sur une branche peu pratiquée au sein de l’histoire du livre : l’histoire de la reliure, dont celles réalisées par Christophe Plantin. Ils portent aussi sur des pièces de collection, des fonds, donations et acquisitions remarquables. Dans quelques articles professionnels, Georges Colin se livre un peu sur la nature de son métier et sur lui-même. Co-directeur de recherches (1958-1992) et des publications (1965-1992) du Centre national de l’Archéologie et de l’Histoire du Livre, établi à la Bibliothèque royale, aujourd’hui dissous, Georges Colin gère plusieurs projets scientifiques et bibliographiques de grande ampleur et de longue haleine, tous conçus par des équipes réduites et par le biais de rapports entre personnes physiques, de bibliographies sur papier, catalogues sur fiches et courriers postaux. Ils ont abouti à des répertoires devenus essentiels, comme la Belgica typographica 1541-1600 (1968-1993), le Dictionnaire des imprimeurs, libraires et éditeurs des XVe et XVIe siècles dans les limites géographiques de la Belgique actuelle (1975), le Répertoire des catalogues de ventes de livres imprimés (1982-2017).

Ses fonctions de conservateur de la Réserve précieuse l’amènent à développer des liens très étroits avec la Société des Bibliophiles de Belgique. Il se charge des aspects pratiques de toutes leurs expositions jusqu’en 1992, fournissant assistance et suivi pour la rédaction de leurs catalogues. Parmi ses nombreuses activités, on signalera son mandat d’administrateur du Musée de l’Imprimerie et la présidence du groupe de contact Commission des Documents rares et précieux au sein de l’Association des Archivistes et Bibliothécaires de Belgique, de 1968 à 1974.

Après sa retraite, Georges Colin se rend encore très régulièrement à la Bibliothèque royale, jusque dans les premières semaines de 2018. Depuis 1945, ce sont donc plus de septante ans de présence dans ce qui était devenu sa seconde maison. C’est plus du tiers, le dernier tiers, de l’histoire de la Bibliothèque royale fondée en 1837.

Un bibliothécaire, un historien du livre s’en est allé, emportant avec lui son savoir et un pan de la mémoire collective d’une institution. Beaucoup lui sont redevables pour ses avis, ses conseils et sa fine connaissance de l’histoire du livre et des collections de la Bibliothèque royale de Belgique. CS

Sur Georges Colin, voir : F. Remy, Le personnel scientifique de la Bibliothèque royale de Belgique 1837-1962 : répertoire bio-bibliographique, Bruxelles, Bibliothèque royale de Belgique, 1962, p. 38 ; Mélanges d’histoire de la reliure offerts à Georges Colin (éd. C. Sorgeloos), Bruxelles, Librairie Fl. Tulkens, 1998, dont bibliographie par Jeanne Blogie ; P. Culot, « Un historien de la reliure, Georges Colin », Le livre & l’estampe, XXXXLVI, 2000, n° 153, p. 171-175.